La
secrétaire nationale Marylise Léon revient sur les enjeux du projet de
loi sur le dialogue social, examiné les 20 et 21 juillet au Sénat.
En quoi une réforme du dialogue social était-elle nécessaire ?
C’est
la suite logique de la réforme de la représentativité. Après avoir
renforcé la légitimité des acteurs, on améliore le cadre de discussion.
L’objectif, c’est d’avoir un dialogue social plus utile, avec le bon
interlocuteur, une information de qualité et au bon moment. Et de
permettre à tous les salariés de bénéficier d’une représentation.
Le projet de loi répond-il à ces objectifs ?
Tous
nos objectifs ne sont pas remplis à 100 %, même si nous avons fortement
pesé à travers nos propositions. Aujourd’hui, le texte prévoit des
outils permettant un meilleur dialogue social : une
information-consultation plus cohérente à des moments clés de la vie de
l’entreprise, le lien entre information-consultation et négociation, la
représentation des salariés des très petites entreprises [moins de
11 salariés], la reconnaissance des parcours des élus et mandatés. Mais
ce n’est qu’un cadre. Il va falloir le faire vivre. Et pour l’heure,
nous n’avons pas de visibilité sur les moyens des représentants du
personnel dans les entreprises de 50 à 300, qui seront déterminants.
Nous jugerons de l’équilibre du texte à cette aune.
La CFDT a-t-elle obtenu des garanties à ce sujet ?
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Dernière ligne droite La
négociation sur le dialogue social a échoué le 22 janvier après quatre
mois de discussions. Le gouvernement a alors repris la main. Au terme
d’une concertation avec les partenaires sociaux, le projet de loi sur le
dialogue social et l’emploi a été présenté le 22 avril en Conseil des
ministres. Il est examiné en deuxième lecture en séance publique au
Sénat, les 20 et 21 juillet, pour une adoption définitive avant la fin
de la session extraordinaire, le 24 juillet.
Le temps des décrets Une
fois le texte adopté, il faudra attendre les décrets d’application pour
qu’un certain nombre de mesures s’appliquent. À partir de ce moment, le
nouveau cadre s’appliquera soit directement, soit au renouvellement des
instances en ce qui concerne la mise en place de la DUP élargie dans
les entreprises de 50 à 300. Les commissions TPE seront quant à elles
mises en place au 1er juillet 2017, après les élections TPE de décembre 2016.
Subrogation La
CFDT a fortement pesé pour obtenir un nouveau dispositif de
subrogation, qui avait été supprimé avec la loi du 5 mars 2014. Un
salarié partant en formation syndicale verra son salaire maintenu dès
lors que son organisation syndicale en a fait la demande à l’employeur.
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Le
Parlement a refusé de voter la garantie qu’il n’y aurait pas de
diminution de moyens, initialement promise par le ministre. On fait tout
pour maintenir des moyens adaptés aux enjeux des nouvelles instances.
Nous avons obtenu l’annualisation et la mutualisation des heures de
délégation. Mais les attributions des représentants du personnel de la
future DUP élargie au CHSCT dans les entreprises de moins de 300 ne
peuvent être remplies avec moins de moyens.
N’y
a-t-il pas un paradoxe à dénoncer les effets de seuil et à renforcer
ainsi la différence entre les entreprises selon qu’elles ont moins ou
plus de 300 salariés ?
C’est
pour cela que la CFDT réclamait de pouvoir négocier le cadre des
instances représentatives du personnel dans les entreprises dès
50 salariés. Le gouvernement fixe un cadre plus rigide pour les moins de
300 au motif que c’est là qu’il y a le moins de négociation. Mais ce
n’est pas un bon moyen de favoriser la négociation dans ces entreprises,
surtout avec une DUP élargie mise en place sur décision unilatérale de
l’employeur. Ce n’est pas un bon signal pour le dialogue social.
Sur
la représentation des salariés des TPE, on peine à y voir clair entre
ceux qui critiquent un dispositif a minima et ceux qui le dénoncent
violemment…
C’est
un peu la théorie des petits pas. Et nous venons d’en faire un grand,
si on considère que le patronat [Medef et CGPME en tête] se battait
depuis quinze ans contre le principe même d’une représentation des
salariés des TPE. Or le dialogue social, ce n’est pas boire le café avec
ses salariés. C’est une première étape qui acte la réalité de la
représentation collective de ces salariés. Demain, ils pourront voter
pour des salariés identifiés issus des TPE. Les futures commissions
paritaires régionales interprofessionnelles leur permettront de mieux
connaître et faire respecter leurs droits. Et les CPRI pourront faire de
la médiation. C’est une vraie victoire, celle de la CFDT !
Le projet de loi introduit la mixité proportionnelle dans les élections professionnelles. C’est une bonne nouvelle ?
Oui !
Des représentants du personnel à l’image des salariés, c’est ce que
nous avons toujours défendu, à l’interne comme à l’externe. Il ne suffit
pas de parler d’égalité professionnelle, encore faut-il l’incarner !
Cela dit, ça ne sera pas facile partout pour nos militants. Il faudra
travailler dans les sections à la composition des listes. Nous allons
les y aider.
Justement, qu’est-il prévu pour accompagner les militants dans la mise en œuvre de ce nouveau cadre législatif ?
Des
rassemblements d’élus sur ce thème vont être organisés dès la rentrée
en vue de permettre l’appropriation des nouvelles règles du dialogue
social dans l’entreprise. Des outils sont en train d’être conçus, un
groupe ressource va travailler aux pratiques syndicales. La maison se
met en ordre de marche pour saisir l’opportunité de booster le dialogue
social dans les entreprises.
Propos recueillis par aseigne@cfdt.f
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