la parole est aux jeunes !

Et si, pour parler réforme des retraites et emploi des jeunes, on commençait par écouter les premiers intéressés ? La soirée-débat “Jeunes à venir” a donné lieu à un dialogue riche d’enseignements entre la CFDT et les organisations de jeunesse. Aperçu.
« Mettez la jeunesse au cœur des négociations ! » Ce cri du cœur lancé par Yannick Miel, de Génération Précaire, lors de la soirée-débat “Jeunes à venir” , prend une tonalité toute particulière, une semaine après l’adoption au Parlement d’une réforme des retraites… dont la jeunesse a été exclue. « La réforme gouvernementale ne répond pas aux questions des jeunes : que se passe-t-il après 2020 ? », s’interroge Sébastien, étudiant en informatique. « Ceux qui décident ne voient que leur propre situation ; les 20-30 ans ne sont pas associés aux débats », rebondit Régis, militant CFDT à Pôle emploi.
Quelle réforme des retraites ?
Si des quadragénaires s’étonnent de la mobilisation des jeunes sur le sujet – « quand j’étais lycéenne, je n’y pensais pas » –, force est de constater que les participants souhaitent être associés à la future réforme du système de retraite qu’a dû concéder le gouvernement sous le poids du mouvement intersyndical. Quelques lignes de force se dégagent. « Le débat sur les retraites ne doit plus tourner autour de l’âge, indique Baki Youssoufou, de la Cé (Confédération étudiante), pour ne pas opposer emploi des jeunes et des seniors. » « Il faut de la justice entre générations et au sein de chaque génération, plaide Caroline, qui rappelle que les préoccupations des étudiants ne sont pas celles des jeunes travailleurs. »
« Une réforme juste doit réparer les inégalités en termes d’espérance de vie, de durée de cotisation et de montant des revenus », renchérit Bertrand Coly, du MRJC (Mouvement rural de jeunesse chrétienne), pour qui il importe d’articuler « justice, visibilité et répartition ». Répondre à ces enjeux de société exige d’« organiser un débat collectif pour que tous s’approprient les enjeux et puissent être acteurs de la réforme », rappelle Inès Minin, déléguée jeunes à la CFDT.
« Penser à la retraite, c’est bien ; avoir un emploi, c’est mieux », lance Damien Créon, délégué syndical CFDT de la Fédération chimie-énergie en Picardie. « La retraite n’est pas notre immédiateté », confirme Yannick Miel. Comment pourrait-elle l’être quand « l’emploi devient une sorte de Graal », indique Victor Colombani, de l’UNL (Union nationale lycéenne) ? Dans ce débat, les mots sont lourds de sens. Quand, comme Pierre, on signe un CDI, il est question de « chance », tout comme quand on a le « choix » de son orientation. Et quand on ne doit pas trancher entre « métier-passion et métier-nécessité, une question qui se pose à chacun de nous », soulève Philippe Loup, de la Fage (Fédération des associations générales étudiantes), c’est une « réussite ».
Rendre les jeunes visibles
Mais pour quelques élus, combien d’exclus ? Au bas mot, 2 millions de stagiaires, dont une forte proportion d’emplois déguisés, rappelle Génération Précaire, qui dénonce une forme de « dumping social », un gaspillage de « l’énergie de la jeunesse » ainsi « mise au ban des cotisations sociales ». Sans compter les précaires – intérimaires, CDD… – qui « n’existent pas auprès des syndicats », accuse Yannick Miel. Même écho de Stéphane Haar, de la Joc (Jeunesse ouvrière chrétienne), qui regrette que les 3 millions de travailleurs de 15 à 30 ans soient « invisibles » dans les débats, car « très précaires et donc peu représentés ».
Une jeunesse transparente ! Pourtant, la « volonté d’engagement » des jeunes existe, de même que leur envie d’être « acteurs de leur avenir ». « On ne veut pas être vus comme des fainéants », dit Alban, qui regrette la vision qu’a la société de sa jeunesse : « Il n’est même pas question de nous ouvrir les portes. On voudrait encore nous dire laquelle prendre. » Stéphane Haar abonde en ce sens, à l’appui d’une enquête de la Joc auprès de 30 000 jeunes : « 80 % d’entre eux ont envie d’entrer dans le monde du travail, synonyme d’autonomie et d’épanouissement. La question est : “Le monde du travail veut-il des jeunes ?” » Forte de son implantation dans les quartiers populaires, la Joc observe « la lutte de beaucoup de jeunes pour survivre », au gré d’emplois précaires et malgré les difficultés de logement. Contre une logique d’assistance, ils réclament « des clés de compréhension du monde du travail ». Une piste d’action syndicale, estime Franca Salis-Madinier, de la CFDT-Cadres, qui relève les fortes attentes des jeunes en termes « de valeurs et de collectif » et le souhait que « les organisations syndicales s’intéressent à eux ». Message transmis !
Oui, des solutions existent
Quelles réponses apporter au problème de l’emploi des jeunes ? « Avec trente années de difficultés d’insertion des jeunes sur le marché du travail », le « bizutage social » n’est pas nouveau, rappelle le secrétaire confédéral Thiébaut Weber, même s’il tend à s’aggraver. « On a multiplié les mesures comme autant de pansements, sans traiter le problème de fond. » Comment éviter le « syndrome “génération sacrifiée”» ? « Il va falloir conjuguer des mesures conjoncturelles, alors que nous ne sommes toujours pas sortis de la crise, et des mesures structurelles, que ce soit l’orientation tout au long de la vie ou l’accompagnement vers l’emploi. »
« Des solutions, il y en a, on les connaît », lance Stéphane Haar, qui rappelle les onze propositions de la Joc issues des états généraux pour l’emploi des jeunes : remise à l’honneur du droit du travail, lutte contre les emplois précaires, accompagnement dans l’orientation et l’emploi, etc. « Encore faut-il avoir le courage de les porter ! » Mais au vu des inégalités qui touchent la jeunesse, « aucune proposition ne mettra tout le monde d’accord ». La solidarité intragénérationnelle ne doit pas être un vain mot.
« La question de l’emploi des jeunes est aussi celle, plus globale, du marché de l’emploi », insiste Thiébaut Weber, qui rappelle que l’objectif pour la CFDT reste « de faire des jeunes des salariés comme les autres ». C’est dans cette optique que la CFDT a souhaité mettre sur la table l’ensemble des sujets qui concerne la jeunesse, ou plutôt les jeunesses, conclut François Chérèque. Pour aborder les questions d’emploi, de logement, de protection sociale, de responsabilité des entreprises, « cette soirée est une expérience de dialogue à poursuivre ». Une manière de rendre la jeunesse visible dans les débats qui la concernent. Des militants CFDT imaginent déjà décliner l’initiative à l’échelon local.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

CGOS info :

Retraite des pères et mères: les nouvelles règles

CGOS : Vos prestations Vacances adultes