"Il y a des bornes à ne pas franchir"

 
 
Interviewé par Libération, le 31 janvier 2012, Marcel Grignard réagit aux annonces du président de la République en refusant que la compétitivité se fasse au détriment du droit du travail.
Que pense la CFDT de ces accords de compétitivité ?

L'idée qu'il faut rechercher dans l'entreprise, et par le dialogue, le meilleur moyen de préserver l'emploi, n'est pas quelque chose que nous rejetons. A condition, cependant, de ne pas aborder le thème de la compétitivité par la seule question du coût du travail. L'objectif du gouvernement, qui est que l'accord collectif s'impose au contrat individuel de travail peut même conduire à renforcer le dialogue social et à préserver l'avenir des salariés. Mais laisser deux mois seulement aux partenaires sociaux pour négocier, au niveau national, le cadre juridique dans lequel pourraient se nouer ces accords d'entreprise me paraît extrêmement court. Ce n'est pas un texte qui se discute sur un coin de table.
Il s'agit néanmoins de demander des sacrifices aux salariés...
La CFDT n'aborde pas la question de la compétitivité des entreprises par le niveau de sacrifices que les salariés devraient accepter… Ce n'est pas notre façon de voir les choses ! Reste que quand une entreprise connaît des baisses d’activités, ce sont généralement les salariés en CDD, en intérim ou encore ceux des sous-traitants qui en font les frais, et ce de façon très brutale.

Tout est donc possible pour sauver une entreprise ?

Non, il y a évidemment des bornes à ne pas franchir. D'une manière générale, ces accords ne doivent pas permettre une remise en cause de la loi ou des garanties interprofessionnelles jugées incontournables. Il faudra regarder de façon attentive ce qui est acceptable ou non pour les salariés, d'autant que ces accords s'imposeront aux contrats individuels de travail. Travailler deux heures de plus dans la semaine ou devoir venir un jour de plus, par exemple, ce n'est pas la même chose. Il faudra poser des gardes fous pour que cela ne nuise pas à la vie des salariés.

Ces accords seront possibles dans n'importe quelle entreprise ?

La vraie question tient à la qualité des informations sur la situation économique et à la sincérité des engagements sur l’emploi. De tels accords supposent un très bon niveau de dialogue social, une transparence sur la gestion et une relation forte entre les syndicats et les salariés.
Des heures supplémentaires de 2007 aux accords d'entreprises pour travailler moins de 2012, le retournement est spectaculaire.
Certes, mais il faut aussi reconnaître que depuis la crise économique, on a changé de monde. Il y a par contre un véritable non sens à réclamer, d’un côté, des accords de compétitivité qui sous-tendent des efforts de la part des salariés, et de maintenir, de l’autre côté, le dispositif des heures supplémentaires défiscalisées qui poussent à travailler plus. Il faut que le gouvernement choisisse. On ne peut pas maintenir les deux dispositifs à la fois.

La décision sur la TVA sociale vous paraît-elle utile ?

C'est une fausse solution à un vrai problème de compétitivité. Car cette augmentation de la TVA va toucher, via la hausse des prix, l'ensemble des salariés, et de façon proportionnellement plus importante, les plus modestes. Et ce, sans pour autant faire baisser suffisamment le coût du travail pour rendre plus compétitives les entreprises françaises. Par ailleurs, si chaque pays européen agit ainsi, la mesure n'aura servi à rien. Elle se résumera à un simple coup d'épée dans l'eau.
 
Propos recueillis par Luc Peillon

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