"Il faut relever le montant des minima sociaux"
En attendant les conclusions de la conférence de lutte contre la
pauvreté, Laurent Berger, interviewé dans Le Parisien/Aujourd'hui en
France du 11 décembre 2012, plaide en faveur d'une hausse des minima
sociaux. Le secrétaire de la CFDT revient également sur Florange en
affirmant qu’il faut poursuivre l’action syndicale pour que les
engagements soient tenus.
Dans
le conflit de Florange les patrons des centrales syndicales sont
restés très en retrait. Pourquoi n'avoir pas soutenu plus ouvertement
les salariés ?
Je l’ai
fait ! C'est le sujet sur lequel j'ai passé le plus de temps depuis que
je suis secrétaire général. Je me suis exprimé plusieurs fois. Mon
boulot a surtout été de travailler en coulisse avec nos copains
d'Arcellor. Nous partageons avec eux l'idée qu'on ne peut pas faire une
confiance aveugle à Mittal. Maintenant il y a des engagements qui sont
pris: le maintien de la filière froide avec des investissements, celui
des 630 salariés et les recherches pour développer le projet Ulcos, qui
permettraient de redémarrer les hauts-fourneaux. Dorénavant le combat de
toute la CFDT c'est que cet accord soit respecté.
La CFDT, comme les autres syndicats a pourtant défendu la nationalisation temporaire. Comment expliquez-vous ce revirement ?
On
n'est pas en porte-à faux. On a balloté les syndicats et les salariés
pendant 18 mois entre douches froides et promesses non tenues, sans
aucun dialogue social de la part de Mittal. Quand le gouvernement nous
dit que la nationalisation était la seule solution et que les hauts
fourneaux allaient repartir on a approuvé à condition qu’il y ait un
véritable projet industriel. Il y a eu un cafouillage gouvernemental,
c'est une évidence. Et bien sûr il y a aujourd'hui une déception
légitime qui est forte chez les salariés. La nationalisation n'a pas été
possible, mais cela a quand même pesé pour sortir du bras de fer avec
Mittal. Une autre solution a été retenue. Elle est acceptable pour la
CFDT. Ce n'est quand même pas tous les jours que l'état Français arrive à
contraindre une multinationale à s'engager pour préserver les emplois.
Il n'y a pas absence de résultats, comme le disent certains. Et c'est
grâce à l'action syndicale.
Vous annoncez la fin du conflit ?
Il
n'est pas question d'arrêter le conflit. Mais il faut savoir rentrer
dans la phase où l'on contraint le patron à tenir sa parole. Nous allons
continuer l'action syndicale pour vérifier ardemment et avec exigence
que ces trois engagements là vont être tenus. Édouard Martin ou l'un
de ses camarades vont faire ce travail dans la commission de suivi.
C'est aussi là que ça va se jouer. Ce n'est pas du tout la fin de
l'histoire.
La
France compte plus de 8 millions de pauvres, dont cinq millions dans
les rangs des salariés. Qu'attendez-vous du gouvernement ?
Qu'il
fasse de la lutte contre la pauvreté une priorité nationale au même
titre que la compétitivité des entreprises. Il faut une mobilisation
générale sur quatre ou cinq ans et des mesures immédiates notamment
pour relever le montant des minimas sociaux et remplacer le quotient
familial par une aide forfaitaire par enfant. Cela aidera les plus
modestes. Il n'est pas acceptable de laisser vivre durablement autant
de personnes dans la pauvreté, dont une majorité de femmes, de jeunes et
de retraités. 5 millions de salariés ne parviennent pas à sortir de la
précarité de l’emploi. Il faut accepter de dire qu'on est dans une
situation où le chômage et la pauvreté s'accroissent. A chaque fois
qu'on prend du retard en matière de lutte contre la pauvreté ça coûte
encore plus cher à la collectivité. La fiscalité doit être un des
instruments pour réparer les inégalités. La société est entrain de se
fragmenter. Le gouvernement doit faire des choix pour que la société
soit plus juste !
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