Inaptitude et visite de reprise : la nouvelle donne

 
 
 
 
Suite à une première décision du 25 janvier 2011, la Cour de cassation invite désormais les entreprises à organiser sans tarder la visite de reprise des salariés classés en invalidité pendant un arrêt de travail. Aux employeurs de faire diligence sous peine d'être condamnés à des dommages-intérêts.

Les faits : une salariée classée en invalidité pendant un arrêt de travail

En l'espèce, l'affaire commence par des arrêts maladie à répétition, puis par la mise en invalidité (2e catégorie) d'une infirmière. La salariée informe alors son employeur de ce classement en invalidité. S'ensuivent des échanges de courriers divers et variés, à l'occasion desquels l'intéressée « sollicite de l'employeur de l'informer des perspectives qu'il envisage au mieux de ses intérêts suite à sa mise en invalidité ». L'employeur finit par clore la discussion « en invitant la salariée à prendre rendez-vous auprès de la médecine du travail ».

L'obligation de passer une visite de reprise

Rien ne se passe pendant près d'un an, jusqu'à ce que l'infirmière mette l'employeur en demeure d'organiser la visite de reprise. Deux examens médicaux sont alors pratiqués, et pour finir, la salariée est déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise. L'intéressée n'en reste pas là et demande notamment des dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait du retard de l'employeur dans l'organisation des visites de reprises. La Cour de cassation juge cette demande fondée et pose un nouveau principe, selon lequel : « dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l'initiative de faire procéder à une visite de reprise laquelle met fin à la suspension du contrat de travail ». Ainsi, à partir du moment où le salarié informe son employeur de sa mise en invalidité, ledit employeur doit réagir rapidement en prenant l'initiative d'organiser la visite de reprise. Ceci afin d'éviter toute situation de « blocage ».

Une visite automatiquement organisée, sauf si le salarié ne souhaite pas retravailler 

Comme on le constate dans la règle qui vient d'être dégagée par la Cour de cassation, la visite de reprise a un caractère automatique. En l'espèce, il était donc inutile que l'infirmière réclame à l'employeur (et même finisse par le mettre en demeure) d'organiser cet examen médical. Car le seul fait, pour un salarié, d'informer l'employeur de son classement en invalidité « sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail » doit suffire à obliger l'employeur à organiser une visite de reprise.
Il s'agit ainsi d'une évolution par rapport à la jurisprudence rendue en 2009 où la Cour de cassation avait estimé que dans l'hypothèse d'un classement en invalidité de deuxième catégorie, « l'initiative de la saisine du médecin du travail appartient normalement à l'employeur dès que le salarié remplissant les conditions pour en bénéficier en fait la demande et se tient à sa disposition pour qu'il y soit procédé » (arrêt du 28 oct. 2009, n° 08-43.251, Depoilly c/ Sté Damade).

La déclaration d'inaptitude

Dans une seconde décision de la Cour de cassation, en date du 26 janvier 2011, il est question de la visite de reprise. Lorsqu'un salarié prend l'initiative d'organiser sa propre visite de reprise et qu'il est déclaré inapte lors de cette unique visite en raison d'un danger immédiat, l'employeur ne réalise pas forcément la situation. Une erreur qui peut lui être fatale, comme le montre cette décision.
Rappelons que selon le code du travail, le salarié bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail après une absence d'au moins 8 jours pour cause d'accident du travail et ce n'est qu'à l'issue d'un deuxième examen que l'inaptitude peut être constatée et qu'on bascule dans la phase de la recherche du reclassement ou face à l'impossibilité de ce reclassement, celle de l'éventuelle rupture du contrat de travail. Mais l'inaptitude peut être déclarée en un seul examen selon la procédure dite « du danger immédiat ». Si l'employeur n'a pas bien suivi le déroulement de l'affaire, et qu'il continue à attendre le second examen médical, il peut se retrouver en faute par rapport à son obligation de reclassement.

Les faits : un salarié qui prend l'initiative de se soumettre à une visite de reprise
 


En l'espèce, le salarié avait été victime d'un accident du travail avec reconnaissance par la sécurité sociale d'une IPP (incapacité permanente partielle) de 70 %. Celui-ci était resté près de 9 ans en arrêt de travail. Puis un jour, il avait informé son employeur par lettre recommandée du fait qu'il comptait prendre « rendez-vous à la sécurité sociale de la médecine du travail » pour y être examiné. En réalité, c'est bien devant le médecin du travail que la visite médicale avait eu lieu. Celui-ci avait conclu à « l'inaptitude du salarié à tous postes de l'entreprise » à l'issue d'un seul et unique examen (hypothèse du danger immédiat pour la santé ou la sécurité).
Voyant qu'à l'issue du délai d'un mois à compter de cet examen médical, non seulement, son reclassement n'avait pas eu lieu ni aucun licenciement n'avait été prononcé, mais qu'en outre, l'employeur n'avait pas repris le paiement du salaire, le salarié avait demandé que la rupture du contrat de travail soit prononcée par le juge.

La jurisprudence peu exigeante concernant les modalités d'information de l'employeur 

Comme on peut le constater dans cette décision, la Cour de cassation ne manifeste aucune exigence concernant les modalités selon lesquelles le salarié doit informer l'employeur qu'il prend l'initiative de faire apprécier par le médecin du travail son aptitude à reprendre le travail. Dès lors, l'employeur doit faire attention, car même si la lettre du salarié l'informant du passage de la visite de reprise est rédigée de manière approximative, les juges pourront considérer que cette information a été faite en bonne et due forme et que donc l'employeur a bien été mis au courant de la procédure activée par le salarié.
Cette jurisprudence doit donc inciter les employeurs à être attentifs au « suivi » de leurs salariés en arrêt de travail.

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